En France, comme dans d’autres pays du monde, on observe une très forte hausse des gestes suicidaires chez les filles de 10 à 19 ans, depuis fin 2020. Chez les garçons, les chiffres restent cependant stables. Comment expliquer ce phénomène ?
De quoi parle-t-on ?
Les études rapportent une augmentation des pensées suicidaires : penser que le suicide peut-être la solution pour ne plus souffrir, qu’il vaut mieux mourir que de vivre des émotions ou des situations difficiles par exemple. A ce stade, la personne imagine qu’elle pourrait se suicider mais n’est pas encore passée à l’acte.
Les chiffres montrent également une hausse des gestes suicidaires ou tentatives de suicide : ce sont les actes par lesquels une personne tente de mettre fin à ses jours. Qu’elle désire réellement mourir, ou qu’elle envoie un appel à l’aide, la personne prend le risque de mourir par son acte. Lorsque son geste entraîne sa mort, on parle de décès par suicide ou de suicide abouti.
Enfin, on rapporte une augmentation des hospitalisations pour automutilations : les scarifications par exemple (entailles volontaires de la peau) sont des blessures que s’inflige la personne lors de moments d’angoisse ou de détresse, qui lui donnent la sensation de moins souffrir psychiquement. Elles ne visent pas à donner la mort, mais témoignent d’un mal-être important.
On observe depuis longtemps une différence entre les filles et les garçons concernant les conduites suicidaires. En cas de mal-être, les garçons auraient plutôt tendance à opter pour des conduites à risques : consommations d’alcool ou de drogues, comportements violents ou dangereux pour eux-mêmes, là où les filles envisageraient plutôt le suicide, mais communiqueraient aussi plus à propos de leur mal-être et de leurs intentions (ce qui peut en partie expliquer les chiffres élevés les concernant, puisqu’elles sont plus en contact avec des professionnels de santé).
Si tous les adolescents ont été exposés aux risques de la crise sanitaire (l’augmentation des conflits familiaux, les problèmes financiers, l’impossibilité de participer à des événements importants pour eux, les difficultés liées à l’enseignement à distance…), il semblerait que les filles aient particulièrement été impactées par la perte d’interactions sociales (le fait de ne pas voir physiquement les personnes), les inquiétudes concernant la santé (comme le fait d’avoir contracté le covid) ainsi que le changement dans les routines scolaires.
Ainsi on a pu constater une augmentation du temps passé à consulter les médias sociaux et une diminution des contacts avec les membres de la famille chez les filles, et une dégradation du sommeil accompagnée d’une hausse du temps de jeu en ligne chez les garçons. Ces comportements s’associent généralement à un sentiment de tristesse, un manque d’élan et de motivation (qui peut conduire à l’abandon des activités habituelles de plaisir) et une dévalorisation.
Si vous vous sentez concerné par les idées suicidaires ou si vous constatez des signes de mal-être chez une personne de votre entourage, vous pouvez contacter le numéro national gratuit Souffrance et Prévention du Suicide : 3114 ou consulter le site infosuicide.org. Vous pouvez également vous adresser à votre médecin traitant, qui pourra vous orienter vers des professionnels de santé. Dans tous les cas, ne restez pas seul.e avec ça.
Sources :
- « Explosion des gestes suicidaires des adolescentes depuis le Covid : un phénomène sans frontière qui demeure inexpliqué », Libération Octobre 2022
- Dossier de la DREES : « L’état de santé de la population en France » Septembre 2022