Alain Corbin dans son livre « Histoire du silence », nous sensibilise sur un phénomène aujourd’hui très générationnel : la loi du silence n’est plus, entendons par là que vivre quelques instants de silence pour certaines personnes semble anachronique et insupportable.
Mais qu’est-ce que le silence ? L’absence totale de bruit ou le simple fait de ne pas être connecté à un son, quel qu’il soit ? Les murmures de la nature rompent-ils réellement une qualité de silence … Ou ne seraient-ils qu’une stimulation auditive qui ne laisse pas le loisir au cerveau de se déconnecter ?!
Et si certains recherchent intensément le silence à travers par exemple des retraites méditatives, d’autres l’exècrent et vont le combattre avec les armes des technologies actuelles, et en particulier la possibilité de coller à ses oreilles des heures d’écoute de musique.
Une époque qui privilégie à ce point l’hyperactivité sonore ne peut manquer par ailleurs d’en payer le coût : des pertes auditives de plus en plus jeunes, des problèmes d’acouphènes plus nombreux et la mise à mal d’une certaine qualité de vie avec un impact sur les relations sociales (manque de communication verbale et recours à la toile internet pour s’exprimer, sans le garde-fou de la réponse contradictoire).
La proximité entre silence et recueillement, entre rêverie et écoute de soi, semble pour certains par trop chargée d’introspection pour être expérimentée plus de quelques minutes. La vacuité sonore ferait-elle trop lourdement écho à la vacuité de l’âme, en ces temps tourmentés et instables… ?
En fait, étonnamment, l’homme contemporain oscille entre intolérance au bruit et refus du silence. Nombre de personnes vous disent ainsi qu’elles ne supportent pas le silence et que radio ou télévision demeurent allumées chez elle pour avoir une « présence » !
Alain Corbin nous explique lui que le silence ne va pas de soi et que si son apprentissage existait auparavant à l’école où le maitre ou la maitresse en exigeaient le respect pour une bonne écoute et attention, le milieu scolaire favorise de nos jours l’expression et la participation. Le silence respectueux d’une classe où l’on entend une mouche voler ( !) représente-t-il un vœu pieu et oublié ?
Et d’écrire : « L’ennemi du silence ce n’est plus l’intensité du bruit mais la connexion permanente, l’incessant flux de paroles qui s’impose à l’individu par le biais des nouvelles technologies, du téléphone portable, qui le conduit à redouter le silence ». Les jeunes en particuliers semblent fuir les pauses silencieuses.
Et pourtant le silence est un précieux moyen de se ressourcer, d’être à l’écoute de soi et de prolonger un peu le bienfait des vacances ! Alors écoutez-le …